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Pédagogie et vulgarisation
11/4/2024

Les sciences participatives

4 min. de lecture
Clément Szuszkin
Consultant en développement durable

Les sciences participatives, qu’est-ce que c’est ?

Les sciences participatives mobilisent la contribution des individus non-scientifiques et non-professionnels pour produire des connaissances scientifiques précieuses [1]. Leur ambition est de rendre la science accessible à tous, qu'il s'agisse d'enfants, d'adultes, de novices, d'amateurs ou d'experts.

Les sciences naturelles ont longtemps été un domaine d’amateurs soucieux de relier avec le vivant. La science peut-elle être un loisir ?

Depuis 2015, un nombre croissant de projets s'efforcent de mobiliser des citoyens pour recueillir des données afin d'évaluer avec précision les impacts du changement climatique sur l'environnement. Cette approche collaborative est également utilisée dans des domaines tels que l'astronomie, l'anthropologie et la médecine.

Des bénéfices mutuels

Les sciences participatives offrent un accès à une vaste quantité de données sur une large étendue spatiale et temporelle, des données que les chercheurs ne pourraient pas simplement recueillir sans l'engagement des citoyens. Pour les participants, qu'ils soient seuls, en famille ou entre amis, cela représente également une opportunité d'expérience à la fois ludique et stimulante, inscrite dans une démarche de curiosité, de découverte et d'apprentissage.

Historiquement une démarche ancienne

Dans les années 1830 en Angleterre, les botanistes professionnels cloisonnés dans les universités, comptaient énormément sur l’aide des amateurs qui allaient collecter des spécimens de plantes au grand air, et leur fournissaient matière à nourrir leurs recherches. Ces amateurs étaient principalement des artisans. Anne Secord (2) rapporte que des réunions étaient fréquemment organisées dans les tavernes. Les artisans pratiquaient la botanique aux pubs, dans lesquels un large éventail de participants de la classe ouvrière étaient impliqués, depuis l’illettré jusqu’à ceux gérant la classification des plantes apprise dans les livres (3).

La convivialité et les réseaux de connaissances sont des éléments fondamentaux des sciences participatives.

À partir des années 1960, les sciences ont connu une période de professionnalisation, notamment due aux avancées de la génétique moderne, de la biologie moléculaire et, plus tard, de la génomique, qui exigent des recherches en laboratoire avec un équipement spécifique.

Les sciences de la vie, axées sur l'observation, ont alors décliné et ont perdu de leur attrait.

Cependant, l'avènement d'Internet à partir des années 1980 a bouleversé la donne, ravivant l'intérêt pour les sciences participatives et élargissant considérablement le nombre potentiel de participants.

Un projet emblématique

"GalaxyZoo" est probablement l'un des projets les plus emblématiques dans ce domaine. Lancé en 2007 par Kevin Schawinski et Chris Lintott, tous deux astronomes, il offre la possibilité aux citoyens volontaires de classifier plus d'un million de galaxies selon des catégories établies par l'équipe de scientifiques afin de mieux comprendre notre cosmos. Ce travail laborieux de classification, qui aurait pris cinq ans à réaliser, est accompli en trois semaines grâce à la participation de plus de 150 000 volontaires, constituant ainsi une remarquable contribution collective (6), (7).

Une initiative pour protéger les arbres dans les écoles

Aujourd'hui, plus de 100 classes scolaires à travers l'Europe, de l'Espagne jusqu'à la Scandinavie, participent au projet Tree Bodyguards (« gardes du corps des arbres »). Le concept est simple et amusant : les élèves fabriquent des fausses chenilles en pâte à modeler verte qu'ils déposent sur des chênes. Ensuite, les classes observent les traces de becs laissées par les oiseaux trompés. Cette expérience vise à comprendre les organismes qui protègent les arbres des insectes herbivores, comme les chenilles et autres parasites. Pour la communauté scientifique, l'objectif est d'anticiper les mécanismes de défense des arbres face au réchauffement climatique et de concevoir des solutions pour les aider à s'adapter (8).

Comment contribuer ?

Votre contribution compte, peu importe votre niveau d’expertise.  Le portail : Open Sciences (9) vous permet de participer à des projets près de chez vous. Découvrez par exemple le programme « sauvage dans ma rue » qui vous permet de répertorier les espèces végétales qui poussent tout autour de chez-vous et de détecter les mutations de l’écosystème.

C’est la science participative qui a permis d’alerter sur le phénomène dramatique de l’extinction des oiseaux sur les dernières décennies. La Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) met en place des programmes de recensement et du matériel pédagogique permettant d’apprendre à reconnaître l’alouette des champs, le moineau et l’étourneau…. : S’engager à nos côtés (10).

Sur Zooniverse (7) vous pouvez trouver des projets participatifs internationaux en langue anglaise.

Si vous êtes plus attiré.e par les jeux vidéos, vous pouvez également donner un coup de pouce à la science. Des « Serious Games » sont organisés par la communauté scientifique.

Parmi les jeux que nous avons trouvé intéressants :

· Cerberus (11): vous accompagne dans la découverte de la planète Mars, votre rôle : classer les images satellitaires et de répertorier le paysage avec ses cratères, ses dunes, ses structures en nids d’abeille.

· EteRNA (12) (développé par l’université de Stanford): vous permet de faire avancer la recherche médicale sur l’ARN messager en constituantdes puzzles avec les molécules d’ARN.

· Et si vous vous sentez une âme de Champollion, découvrez le jeu Glyph (13) mis en place par l’Institut Max Planque dont le but est d'explorer le mystère de la forme des lettres dans les systèmes d'écriture du monde entier (14).

Alors, à vous de jouer !

 

Sources :

1. François Houllier, Pierre-Benoît Joly, Jean-Baptiste Merilhou-Goudard, (Natures Sciences Sociétés), Les sciences participatives : une dynamique à conforter,2017.

2. Louise Couëffré, Circé, Collecter des plantes par dizaines. La réalisation des exsiccatas dans l’Ouest de la France dans la deuxième moitié du XIXe siècle, 2023.

3. Secord, Anne. “La connaissance de l’un devient la connaissance de tous”: participation des artisans à la botanique anglaise du début du XIXème siècle. In Des Sciences Citoyennes? La question de l’amateur dans les sciences naturalistes (pp. 90–107),2010.

4. Hanoteaux,S. (La ligue de l’enseignement de l’éducation permanente), Les Sciences Participatives Collaboration entre citoyens et scientifiques, édition2017, https://ligue-enseignement.be/sites/default/files/2022-07/Sciences-Participatives-web.pdf.

5. Le Collectif National des Sciences Participatives Biodiversité, Mieux connaître les sciences participatives, Open Science Participatives, 2023, https://www.open-sciences-participatives.org/sciences-participatives/

6. INRAE, Rapport, les sciences participatives, 2016 https://hal.inrae.fr/hal-02801940/file/annexes-rapport-sciences-participatives-fevrier-2016_3.pdf

7. https://www.zooniverse.org/projects/zookeeper/galaxy-zoo/

8. Radio France, Les gardiens des chênes : une étude de science participative sur les arbres victimes du réchauffement, 4 juin 2021, https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/grand-angle/les-gardiens-des-chenes-une-etude-de-science-participative-sur-les-arbres-victimes-du-rechauffement-1113917

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